e magnifique il n'en avait que le nom et les atours. Son œil porcin brillait d'une lueur sadique. Une Daeva asmodéenne était enchainée nue au trône de marbre noir. Ses ailes avaient été brisées, des stigmates mauves altéraient sa magnifique peau aux reflets bleutés, des larmes de sang et de honte ruisselaient sur ses joues. Yrian la chassa d'un grand coup de pied dans les côtes en accentuant son geste d'un rire de dément. La malheureuse alla se réfugiée derrière le trône aussi loin que la chaîne pu lui permettre.
« « Pourquoi oses tu me déranger à pareille heure, maudit ruffian, tu sais ce qu'il peut t'en couter si tu n'a pas un bon motif de le faire. Je pourrais te faire dépecer et mes worghs se régaleraient de ta chair putride. Allons parles et sois bref j'ai quelques détails à régler avec cette petite daeva. Dit il en faisant un clin d'œil à Sam
Tout en parlant il tira d'un coup sec sur la chaine arrachant la jeune captive de sa prostration et la projetant sur les escaliers qui menaient au trône. L'homme devait avoir une force phénoménale.
Sam se releva non sans avoir fait une révérence. Je voulu faire de même mais le géant me frappa violemment dans le dos avec son sceptre en émettant un son rauque et je me trouvais de nouveau agenouillé.
« « « Je vous amène une petite perle pour renforcer nos rangs, mon bon maître
La sueur qui perlait sur le visage de Sam témoignait de sa peur. Il serrait frénétiquement la garde de son épée et s'épongeait mécaniquement le front avec un mouchoir crasseux en dentelle.
« « « Un petit daeva orphelin, qui n'a plus de foyer. Sa nature s'est déjà révélée. « «
Il arracha soudain ma chemise et d'un coup de pied dans les reins m'envoya à plat à ventre au pied des escaliers. A l'aide d'un couteau il coupa la corde qui m'enserrait et coupa complètement ma chemise. Mon visage se trouva proche de celui de l'asmodéenne. Cette dernière me cracha au voyage en me criant des insultes ce qui fit de nouveau rire l'immonde Yrian. Son regard s'attarda sur mes protubérances osseuses et mes ailes se déployèrent. Je ne contrôlais toujours pas parfaitement le déploiement de celles ci. J'en profitais pour tenter de décoller , mais je ne vis aucune issue.
« « « Mettez ce petit oiseau en cage, je le ferais dresser par Maîtresse Nilinya. La matrone le mettra au pas et lui enseignera quelques rudiments de sa nouvelle vie . Tiens voilà pour ta récompense et maintenant disparais de ma vue. « « Samouss attrapa prestement la petite bourse de cuir que venait de lui lancer son maitre de guilde. Il recula rapidement tout en esquissant une courbette et disparu très vite de la caverne. » » »
Yrian venait d'attirer à lui la jeune asmodéenne et ses mains commençaient à s'égarer sur les courbes de celle ci. Le géant m'attrapa par la nuque et me poussa vers une porte dérobée. Celle-ci menait à un long couloir taillée dans la pierre. De part et d'autres de celui-ci des cellules munies de barreau en fer avaient été creusées. On me jeta dans l'une d'entre elle. Le choc avec le sol fût rude. Je me redressais et observait mon environnement. Ma cavité était étroite et je ne pouvais m'allonger que dans le sens de la longueur. Les murs étaient maculés de tâches brunâtres, probablement du sang et une forte odeur d'urine montait du sol. Je me mis assis à l'opposé de l'entrée et je commençais à réfléchir aux évènements qui m'avaient entrainés ici. Il y avait encore quelques jours j'étais un enfant heureux. Ma vie avait basculé si soudainement et depuis... Mes pensées furent interrompues par un murmure.
« « « Psst le nouveau... Pssst... « « « « Le chuchotement provenait de la cellule qui faisait face à la mienne. Je me relevais en agrippant les barreaux. La lueur diffuse d'une torche me permettait de voir l'individu qui m' appelait. Sale et débraillé, l'homme avait le visage mangé par une longue barbe blanche jaunie de crasse, des cheveux longs gris et filasses. Des yeux noirs brillaient dans de profondes orbites. « « « «
« « « Ahahaha, jolie petit oisillon tombé du nid, Ahahahah, jamais tu ne reverra ta maman « « «
L'homme semblait fou. Il parlait tout en gesticulant et ses propos devenaient incohérents.
« « « Nonnn Nonnn pas de poudre d'Aether, Nonnnnnnnnnn laissez moi « « « Oui j'ai trouvé la formule.. non ça ne marche pas.. » » »
Je me désintéressais très vite de lui car il semblait avoir perdu l'esprit. La fatigue eu très vite raison de moi et malgré l'inconfort je m'endormis très rapidement.
Le bruit de la clé dans la serrure me réveilla en sursaut.
« « « Debout croquant «
La voix rauque était autoritaire. J'avais très vite compris qu'il me fallait obéir rapidement.
Je me redressais rapidement. Stupéfait, je me trouvais face à une femme d'un âge relativement avancé, vêtue d'une armure brillante en plaque, des cheveux rouges coupés ras encadraient à peine un visage buriné par le soleil. Elle avait les mains sur les hanches et dardait vers moi un regard d'un bleu glacial. Une large épée simplement accroché par un baudrier en cuir dépassait de son dos.
« « Allez bouges toi chien !!! ton instruction commence maintenant. Tu va être mon élève et tu m'accordera tout le respect qui va avec.. A la moindre remarque désobligeante envers ma personne tu sera châtié par des coups de fouet. Tu obéira et tu ne posera aucune question. Lorsque ta véritable nature et ton orientation nous aurons trouvé, la tu sera autorisé à t'exprimer. Suis moi. « « « «
Nous primes un couloir qui semblait remonter vers la surface, les murs de pierre brute laissèrent la place à des murs lissés d'un enduit coloré. La guerrière ouvrit une grande porte en bois précieux. J'entrais dans une immense pièce pourvue d'un dôme vitrée. Des barres suspendues par des chaines oscillaient accrochées à la structure métallique du plafond. On aurait dit une gigantesque volière. Des glaces entouraient la pièce et le sol était revêtu d'un parquet en bois précieux parfaitement ciré. Des piles de tapis s'entassaient dans un coin. Mon examen des lieux fut très vite interrompu par une bourrade dans le dos.
« « « « Allez gamin.. première leçon la patience « « « Nilinya me tendit une bonbonne faite de verre et d'osier et un chiffon.
« « « « Tu vois cet immense parquet ? Tu va le cirer pendant des jours et des jours et pour ce faire tu bougera les gros tonneaux emplis de plomb d'un côté de la pièce à l'autre. Allez au boulot.. Je te surveillerais assise dans ce fauteuil bien confortable. Attention je ne dors que très peu la nuit et j'ai tendance à m'assoupir le jour, mais j'ai l' œil vif et je garde ce fouet à proximité de la main. Il t'en cuira si tu fais une pause « « « «
Ainsi commença mon apprentissage, peu à peu ma silhouette commença à changer. Les muscles de mes bras devinrent fermes et des formes commencèrent à s'y dessiner. La surveillance de mon instructeur ne se relâchait jamais. On m'avait changé de cellule et donné celle voisine du vieux fou. Elle était sommairement meublée d'une paillasse et d'une petite table. On m'avait généreusement octroyé une chandelle.
Je venais à peine de terminer ce jour là, le cirage du sol, lorsque Nilinya me tendit un bâton taillé dans du bois d'Eltnen alliant souplesse et solidité.
« « « Bien maintenant que tu a suffisamment de muscle nous allons commencer des exercices un peu plus physiques. « « « « dit elle en ricanant et en enlevant sa cuirasse en plaque.
Elle me frappa soudainement d'estoc, je m'effondrais sous la douleur et je reçu immédiatement un nouveau coup assorti d'un coup de pied qui m'envoya rouler.
« « « Larve !!! défend toi !!! « « «
Je me redressais, la rage se lisait dans mes yeux et je fonçais aveuglément vers ma tortionnaire. Hélas, pour une femme de son âge, elle faisait preuve d'une grande souplesse. Anticipant mon mouvement, elle se jeta du côté évitant ma charge, fit une chute avant en roulade, se rétablie derrière moi et tout en se redressant m'assena de nouveau un coup magistral sur mes épaules, m'arrachant un nouveau cri. Je me retournais vivement, je ne lisais que de l'amusement dans ses yeux. Cela attisa encore plus ma rage. Je me concentrais et mes ailes jaillirent. Je me mis à l'abri sur le perchoir le plus haut pour reprendre mon souffle. Soudain je la vis, face à moi, de somptueuses et immenses ailes blanches déployées. Elle me regardait avec amusement et profitant de ma surprise me donnant un nouveau coup de gourdin sur l 'avant bras ce qui me fit lâcher mon arme de fortune. Déséquilibré, je glissais du perchoir. Je ne sais trop comment j'arrivais à planer jusqu'au sol. Je levais la tête pour la voir piquer vers moi tel un faucon. Je réussi à éviter son attaque de justesse. Elle resta un moment devant moi en vol stationnaire à un mètre du sol.
« « « « La leçon est finie pour aujourd'hui, demain tu commencera tes entrainements de vol. Va te reposer. « « «
De nouveau l'obscurité de ma cellule, de nouveau le babillage incessant de mon colocataire. Une corbeille de fruits frais avaient été déposés sur le sol et je les dévorais avec avidité. Je retrouvais avec bonheur la saveur légèrement acidulée des oranges de Verteron. J'en fi rouler une jusqu'à la cellule de mon voisin. Sa longue main blanche s'en empara avec assiduité.
« « « « Merci mon jeune ami « « «
Je restais stupéfait. Il venait de me parler d'une voix posée, sans aucune trace de folie.
« « « « Euh ....... « « « « balbutiais je.
« « « « Ne t'inquiètes pas, ma pseudo folie n'est faite que pour tromper le tyran. Il m'a capturé il y a des années pensant obtenir des faveurs de ma part et de l'aide pour ses entreprises criminelles. A l'issue d'une séance de torture j'ai simulé un malaise et feint d'être devenu simple d'esprit. Pour l'instant j'ai trompé leur vigilance mais je croyais qu'ils avaient placé quelqu'un pour m'espionner en l'occurrence toi. J'ai pu constaté que tout comme moi tu étais leur prisonnier. Tu es un jeune Daeva n'est ce pas ?
J'hésitais à faire confiance à cet homme mais j'avais détecté quelque chose de bon en lui qui me poussait à lui raconter mon histoire. Il m'écouta une bonne partie de la soirée.
« « « « Eh bien mon jeune Jayce, si jeune, si éprouvé déjà par les vicissitudes de la vie, je vais te conter la mienne mais très brièvement car elle est bien plus longue. « « « «
« « « « Euh, depuis le décès de mes parents je n'ai révélé à personne le prénom que mon père me donnait. Comment avez vous su ? « « « « «
« « « « Il y a bien des mystères que tu ignore encore, mon jeune ami. Saches que je connaissais ton père. « « « « «
« « « « Vous avez connu mon père ? « « « «
« « « « Oui oui mais si tu m'interromps tout le temps je ne pourrais jamais te révéler comment. « « « « « dit il dans un soupir
« « « « « Je me nomme Kendhar, et je n'ai pas été toujours ce vieil homme sale, dépenaillé et privé d'une partie de ses pouvoirs. Avant le grand cataclysme j'étais un mage et l'un des proches conseillers du seigneur Asphel. J'essayais de modérer mon seigneur par ma sagesse, hélas il écoutait plus souvent ses conseillers militaires extrémistes. Je connaissais ton père. Il était l'un des meilleurs rangers de sa légion et il s'est illustré de nombreuses fois sur les champs de bataille. Beaucoup de balaurs, ont succombé sous ses flèches meurtrières. Il s'est toujours refusé ensuite à combattre les asmodéens malgré les nombreux appels aux armes qu'il a reçu. Il préférait sa simple vie de paysan avec son épouse et toi son enfant. Pour moi les choses furent bien différentes. Séparé de la légion d'asphel lors de la dernière grande bataille, je n'eus plus que le choix de m'enfuir vers Asmodéa et ses vertes prairies. J'étais affaibli et j'avais perdu une grande partie de mon énergie magique. Je restais quelques mois à la citadelle de Verteron. Ton père venait me rendre visite et m'amenait des produits naturels qui contribuèrent largement à rétablir mes pouvoirs. Je mis ceux ci au service de l'armée élyséenne et me retrouvais affecté à la forteresse d'Eltnen. Pendant des années, je rempli mon devoir, combattant les balaurs et les asmodéens dans les abysses, défendant nos frontières contre les envahisseurs. J'ai vu tant d'horreurs, tant de morts calcinés par mes incantations incendiaires que je peux encore aujourd'hui sentir le goût de la chair brûlée. J'en avais assez de cette vie de combat et lorsque l'on me proposa un poste de professeur à l'académie militaire à Sanctum, je me suis empressé d'accepter. Ces maudits ruffians m'ont capturé un soir alors que je rentrais seul dans ma demeure non loin des quais. Une flèche enduite d'un puissant narcotique eu raison de moi avant que je ne puisse me défendre à l'aide de mes sorts. Depuis ils droguent ma nourriture et mes pouvoirs s'affaiblissent de jour en jour. Je suis à peine capable d'allumer une chandelle. » » » »
« « « « Je vous aiderais à sortir d'ici, maitre kendhar. Nous partagerons ma nourriture et vous vous débrouillerez pour faire disparaître celle qu'ils vous donnent. Je continuerais mon entrainement afin de gagner en force. J'ai confiance en ma bonne étoile même si depuis quelques temps elle m'a abandonné. » » » »
à suivre.